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mardi 23 avril 2013

Récit d'expo : De l'Allemagne, 1800-1939 : De Friedrich à Beckmann, au Louvre (# 1)


Le Saut du Rocher, Schnorr Von Carolsfield
Il y a deux semaines, je suis allée avec Grazyel voir l'exposition temporaire du moment au Louvre : "De l'Allemagne, 1800-1939. De Friedrich à Beckmann".

C'était une excellente expo.
Riche (d'innombrables salles remplies de tableaux tous plus enchanteurs les uns que les autres), bien informée (contextualisation exhaustive, on ne se sent pas perdu, même quand on n'y connaît rien !), et on a vraiment l'occasion de découvrir un bon nombre de tableaux de peintres ordinairement non présentés à Paris, donc c'est le moment d'en profiter !

On commence avec les peintres fin XVIIIe / début XIXe,  aux sujets assez religieux, qui essaient de trouver dans la religion un thème, un fil rouge qui puisse unifier les différentes provinces qui forment aujourd'hui l'Allemagne. A l'honneur donc, les deux amants que vous voyez sauter ici à gauche, dans une expression de béatitude et de salut divin...



C'est souvent la célébration du clair de lune qui investit le paysage d'une aura magique, et le fait baigner dans son clair-obscur inquiétant... châteaux comme cabanes, l'imagination se débride et prend tout son essor.

Chevalier devant une cabane de charbonnier, Fhor
et Château de Scharfenberg, Oehme


Puis on passe aux lieux du sacré, les temples :

Le temple de Junon à Agrigente, Friedrich
et Le Walhalla près de Ratisbonne, Klenze


Imaginaire mythologique de la Grèce antique, mythologie proprement germanique du Walhalla (La Walkyrie, Siegfried, Le Crépuscule des dieux... le Walhalla est le royaume des dieux dans ces contes et opéras, un peu comme l'Olympe pour la Grèce antique).

On reconnaît le côté très mystérieux de Friedrich (je développerai ça dans une minute quand je vous bombarderai de tableaux de lui, il était à l'honneur dans cette expo !).

Quant au tableau de Klenze, détail important ou non, je ne peux pas dire (je ne suis pas étudiante en histoire de l'art...) mais ce qui m'a surtout frappée dans son tableau, c'est le contraste entre le chemin en zigzag, fait de terre, qui mène jusqu'au temple, et tout à coup les escalier très droits, toujours avec des lignes en zigzags mais plutôt comme une ligne brisée que comme une courbe... un peu comme un éclair de foudre aussi peut-être (mais bon le Walhalla ce n'est pas Zeus !).


La cathédrale en hiver, Oehme et Eglise gothique en ruine, Blechen



La cathédrale,
Friedrich




On retrouve la cathédrale comme refuge et lieu du sacré, véritable repaire dans la nuit... mais la cathédrale est aussi souvent représentée en ruines, et on commence à voir le Romantisme qui pointe le bout de son nez (n'oublions pas qu'il est né en Allemagne) avec toutes ces méditations sur les ruines et le temps qui passe, la caducité des choses...

...mais lieu avant tout placé sous le signe de la protection des anges et de la transcendance (une nature surhumaine, supérieure, divine, dans le monde intelligible), comme vous pouvez le voir dans le tableau de Friedrich juste ici (en très petit !).







Le réveil du printemps, Böcklin

Après quoi, on passe à des peintures plus colorées, plus saturées, notamment de Böcklin, qui est un peintre sur lequel j'ai eu un coup de coeur.

Peintures de célébration, hautes en couleur comme Le réveil du printemps, ou parfois plus sombres et inquiétantes comme...



Villa en bord de mer, Böcklin


Cette peinture m'a charmée pour son côté abandonné : on n'a aucune idée de là où se trouve cette villa, probablement sur un littoral, mais l'horizon sans terre et le côté solitaire du personnage me donne l'impression que c'est une villa éloignée de tout, sur une île lointaine... la nature est sauvage : le vent courbe les arbres, les vagues sont violentes, et la femme au premier plan semble soucieuse.



Le jeu des Néréïdes, Böcklin


Quant celle-ci, elle est autrement plus inquiétante : les teintes prennent des reflets cauchemardesques, on commence à se croire dans un film de Tim Burton (non, je n'ai pas peur des anachronismes). Le jeu semble mortifère, cette danse dans l'eau est peut-être une danse macabre. SI vous cliquez sur l'image pour l'agrandir, vous verrez même peut-être cette créature dont on ne voit que les yeux globuleux sortir de l'eau, à la droite du rocher autour duquel jouent les sirènes et Néréïdes... 






Et après cette Médée à l'urne de Feuerbach, ce sera le moment de passer à la grande panoplie de Friedrich !







"Clos ton oeil physique afin de voir d'abord avec ton oeil de l'esprit, ensuite fais monter au jour ce que tu as vu dans ta nuit" Friedrich




          Ravin dans l'Elbstandstein                                                Ville au lever de lune


                        En bateau                                                                       Neubrandenburg

Et beaucoup de paysages de montagne...


Brume matinale dans les montagnes

Ce côté à moitié visible, à moitié invisible du sommet, des sapins... magnifique. Le tout happé dans un vortex blanc à la fois beau et menaçant.
(et là c'est le moment où on se dit que Friedrich a dû se les cailler pour peindre ce tableau...)





Paysage du Riesengebirge


Un aspect beaucoup plus paisible, plus clair, que d'ordinaire chez ce peintre.










Et enfin Matin en montagne

... qui m'a plu pour son côté "lever du soleil", à l'aube : on sent qu'une transition est en train de s'opérer, un état de changement cosmique entre deux moments de la journée... le jour se lève doucement, le rose poind à l'horizon.






C'est fini pour la session Friedrich !
J'espère que vous avez aimé autant que moi cette citation que j'ai mis en grand...
Mon préféré entre tous n'est pas là (Le voyageur contemplant une mer de nuages, cliché, n'est-ce pas ?), mais parmi ceux que j'ai fait apparaître sur cet article, mes favoris sont Ville au lever de lune et Neubrandenburg. Et vous, lequel vous parle le plus ? Est-ce que vous sentez cette subjectivité romantique que le peintre prônait ?


Monument à Goethe, Carus





Je vous quitte sur ce tableau de Carus, en vous promettant un prochain article sur cette exposition, pour aborder tout ce qui est fin XIXe / début XXe, notamment avec le choc de la première Guerre mondiale et la révolution des formes, les peintres cubistes ou dits surréalistes... à venir !

Goethe, roi parmi les artistes allemands... un tombeau digne de ses accomplissements.






7 commentaires:

  1. (Genre, personne n'est venu dire que ton article était génial :D heureusement que je débarque !)

    Tu me donnes envie de retourner à cette exposition. Elle m'a convaincue du talent des allemands et de tout ce qu'ils nous ont apportés =)
    Bien sûr, j'adore toute la partie que tu viens de réserver à Friedrich. Ses tableaux ont peut-être un côté divin, mais ce que j'admire dedans, c'est tout le surnaturel qu'il fait entrer dans le paysage. Certes, il n'y pas de surnaturel, c'est plutôt une atmosphère... Mais quand même, en peignant ces espaces larges ou hauts, ils donnent un sentiment d'impuissance de l'homme face à la nature. Ou encore, de placer l'homme dans cette nature violente et effrayante (même dans ses paysages le plus calme, on a une impression de petitesse qui effraie, je trouve). Ce peintre un génie \o/ mon équivalent de Musset en peinture :'D
    En tout cas, ton article parle de tout ce que j'ai préféré dans cette exposition (j'aime moins la fin XIXème et le début du XXème), mais j'ai hâte de voir la suite :D

    Et demain, on retourne voir deux tableaux de Friedrich que j'affectionne particulièrement *glousse de plaisir et sait déjà qu'elle va pleurer*. Ah... Le romantisme !

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    1. Je te jure, je me sentais aussi seule que les cathédrales abandonnées xD je me disais "... mais ! Pour l'amour de Friedrich !".
      Tu as raison pour le côté surnaturel, je pense. Après tout, Friedrich veut faire surgir les profondeurs de la conscience, et en général c'est là que siègent tous les démons, les créatures de la nuit, et les choses étranges et inquiétantes =) et ses couleurs sont toujours magnifiques, ça prend des allures de révélation... brrr, j'en frissonne ! ^_^
      Oh oui, demain on retourne à Orsay ! J'en profiterai pour noter quelques titres de tableaux et je ferai un article dessus à l'occasion (ce blog passe du côté obscur de la force, mes prochains articles ne parleront que d'expo xD, et les chroniques dans tout ça ?)

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  2. Oh mon dieu ! Quelle superbe sélection de tableaux ! Je n'ai pas entendu parler de cette expo, mais j'espère vraiment avoir le temps d'aller la voir ! Dès que j'ai fini avec mon stage et mes examens, j'irai vagabonder au Louvre ^^

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    1. Tu me vois très contente que ça t'ait plu ^__^

      Cette expo est vraiment bien ! Bon, comme toutes les expos temporaires du Louvre, c'est pas donné u_u (12 euros... urgh) mais ça vaut vraiment la peine, elle est super bien faite, très complète, très diverse... il y en a un peu pour tous les goûts même si paradoxalement l'expo entière est reliée par un fil directeur. Et elle va jusqu'en juin je crois =) , donc tu devrais avoir le temps (j'imagine que tu as tes partiels à la mi-mai aussi).

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  3. Ah oui j'oublie que les expositions ne sont pas gratuites contrairement à l'entrée au musée T_T Mais j'irai en juin, c'est noté !

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  4. Rolala j'ai failli manquer ce super article >< On a pleins de tableaux en commun en fait c'est chouette ^^! Je te rejoins aussi pour ton préféré de Friedrich héhé. J'ai eu un véritable coup de coeur pour Blechen personnellement depuis que je l'ai découvert à Orsay et au Louvres. Comme quoi cela à forcément du bon de se cultiver de temps en temps :D. Bref cette expo était toute aussi bonne que celle sur le romantisme noir *_*. Tu nous mets la pression à Matilda et moi pour nos prochains articles "spécial expos" avec toutes ces belles choses que tu as écrites ;)
    PS: Oui j'ai ri pour le "Friedrich a dû se les cailler pour peindre ce tableau" xD

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    1. Oui, ces deux expos sont géniales, et en plus elles se rejoignent et se répondent sur bien des aspects donc c'est d'autant plus intéressant d'aller voir les deux à peu de temps d'intervalle, on comprends bien plus de choses, on peut établir des paralèlles... :) rohh, vous ferez de superbes articles, je vous fais confiance !

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«Il faut tout dire. La première des libertés est la liberté de tout dire»
Maurice Blanchot

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