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vendredi 3 mai 2013

Chronique de Carmilla, Sheridan Le Fanu

  Dans un château de la lointaine Styrie, au début du XIXe siècle, vit une jeune fille solitaire et maladive. Lorsque surgit d'un attelage accidenté près du vieux pont gothique la silhouette ravissante de Carmilla, une vie nouvelle commence pour l'héroïne. Une étrange maladie se répand dans la région, tandis qu'une inquiétante torpeur s'empare de celle qui bientôt ne peut plus résister à la séduction de Carmilla... Un amour ineffable grandit entre les deux créatures, la prédatrice et sa proie, associées à tout jamais « par la plus bizarre maladie qui eût affligé un être humain ». 

  Métaphore implacable de l'amour interdit, Carmilla envoûte jusqu'à la dernière ligne... jusqu'à la dernière goutte de sang ! Maître du récit de fantômes et de vampires, dans la tradition romantique du roman noir, l'Irlandais Sheridan Le Fanu (1814-1873) est l'un des pionniers du roman de mystère anglais. Carmilla (1872), texte fondateur du récit de vampires, annonce le Dracula (1897) de Bram Stoker.

Voilà que je cède à la fièvre pour les histoires de vampires ! Cette lecture m'a beaucoup plu.

  Je l'ai lu en anglais, contact direct avec le style de l'auteur donc ! C'était très agréable à lire, l'auteur trouve un juste milieu entre une syntaxe enchevêtrée et poétique et une simplicité de la syntaxe ; un style "gothique" est donc très présent, avec ses labyrinthes et ses obscurités, mais en même temps le texte est clair puisqu'il se présente comme une lettre de que Laura (l'héroïne) envoie à quelqu'un pour lui raconter l'histoire de son aventure avec Carmilla, depuis la première fois que cette dernière a planté ses crocs dans sa chair quand elle était enfant, jusqu'à la résolution de l'affaire. De plus le texte est assez court (95 pages dans mon édition) et divisé en un bon nombre de chapitres qui vont rarement au-delà de 5 pages, donc ça se lit très vite.

  On retrouve toute l'atmosphère du gothique anglais : le château éloigné, les jeunes filles malades, les cimetières, les personnes mystérieuses aux masques, les passages secrets, les cauchemars, le somnambulisme... et en même temps c'est vrai qu'on sent qu'on s'en éloigne : il y a une véritable analyse psychologique, ne serait-ce que parce que le récit est fait en première personne, et de plus, par une femme, ce qui est assez inhabituel. J'aurais bien aimé que cette analyse soit plus poussée, car Laura est assez silencieuse sur ses émotions, hormis dans la partie au début où elle décrit sa fascination pour Carmilla... le livre se termine d'ailleurs sur une très belle note de restes d'envoûtement, je pense qu'il n'y aurait pas pu y avoir de plus belles dernières lignes pour cette histoire (vous me direz ce que vous en pensez une fois que vous l'aurez lu, si ce n'est pas déjà chose faite !). Mais j'imagine que ça ne se faisait pas encore trop, à l'époque (1871), surtout pour décrire les émotions d'une femme... et puis le récit est déjà très transgressif symboliquement parlant, et même parfois de manière évidente : l'homosexualité suggérée entre Laura et Carmilla est l'un des principaux charmes du livre. D'ailleurs tout ce côté femme vampire libidineuse qui corrompt une jeune vierge blonde (la fair maiden anglaise) m'a beaucoup rappelé le poème inachevé Christabel de Coleridge (cliquez ici pour le lire sur Wikisource, c'est magnifique).

  En outre il est intéressant de noter que ce livre se présente comme un classique pour nous lecteurs du XXIe siècle : nous sommes habitués aux histoires de vampires, si bien que nous ne lisons pas cette histoire pour le suspense, mais plutôt pour son pittoresque...

En résumé : très bon livre, à se procurer à tout prix ! Et je remercie Matilda de m'avoir menacée jusqu'à ce que je le lise ;)


Prochain article dans quelques jours chers lecteurs,
 je suis à Reims chez Grazyel pour le week-end  !
Alacris

8 commentaires:

  1. Je suis contente que tu aies aimé (non pas qu'il y ait eut une autre possibilité) et ton billet me donne encore une fois envie de le relire (peut-être en anglais cette fois par contre).

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  2. Tout comme Matilda (qui est une véritable tyranne quand il s'agit de 'suggérer' des lectures. Coucou Matilda :p ), ton billet me donne envie de le redécouvrir en anglais cette-fois.


    J'avais vraiment adoré ce texte, son ambiance, la relation entre Carmilla et Laura... Bref, tout !

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  3. Matilda et Méloë ==> OUI, OUI, à relire en anglais !
    Et je recommande chaudement Christabel aussi, si vous êtes amatrices de poésie romantico-gothique ;)

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  4. Bon je prends le risque de répéter Matilda et Méloé en disant que j'ai très envie de le relire en anglais aussi et de découvrir d'autres de ses oeuvres. Je prends note pour Christabel ;)
    C'était encore un très bon article que tu nous as offert n_n

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    1. Merci, c'est trop gentil ! Et je n'aurais pas fait cet article si vous ne m'aviez pas recommandé le livre ;)

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  5. Pour répéter ce que Matilda,Méloé et Jamestine ont déjà dit, tu me donnes sacrément envie de le relire XD

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  6. Excellent article :D Ton avis me donne envie de le lire. Ca fait des années que j'en entends parler et je ne m'y suis jamais intéressée (pourtant, je suis quasi sûre qu'il se cache quelque part à Reims, dans ma bibliothèque o_o).
    Après, le poème dont tu parles me donne plus envie que Carmilla... Peut-être parce que ta propagande est parfaite xD
    Je te redirai ça dans quelques temps !

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    1. Héhé, je sais vendre ce que j'admire ! Par contre Christabel est difficilement abordable, car à ma connaissance il n'existe pas de traduction en français, et il y a du vocabulaire et une syntaxe poétique très début XIXe qui peut décourager à la lecture... je pourrai toujours t'accompagner dans ta lecture et éclairer ta lanterne, mais il faudra s'accrocher !

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«Il faut tout dire. La première des libertés est la liberté de tout dire»
Maurice Blanchot

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